L'étrange affaire du Druze Tiran

Israël.

C'est l'histoire d'une tragédie inutile. Tiran Fero, un jeune Druze israélien de la localité de Daliat al Carmel, près de Haïfa, élève de Terminale, s'était rendu mardi à Djénine avec un camarade, pour y faire réparer sa voiture, malgré l'interdiction pour tous les citoyens israéliens de pénétrer dans les agglomérations palestiniennes. Le jeune qui conduisait perd le contrôle du véhicule et les deux amis sont blessés. L'un des deux est évacué par un hélicoptère de Tsahal, mais Tiran est intransportable. Il reste à l'hôpital de Djénine, où il est opéré. Son père et son oncle se précipitent à son chevet. Le jeune homme est toujours dans le coma, quand une vingtaine d'hommes, masqués et armés font irruption dans l'hôpital, et selon le témoignage de son père, Tiran est toujours en vie quand les terroristes s'emparent de lui, mais succombe quand il est coupé de son respirateur. La famille du jeune homme parvient à échapper aux terroristes et à s'exfiltrer de Djénine. Les ravisseurs, qui se réclament des brigades des Martyrs d'Al Aqsa du Fatah, affirment qu'ils ne rendront la dépouille qu'en échange de corps de terroristes tués dans des accrochages avec Tsahal. Durant les 36 heures qui suivront, la famille de la victime vivra une terrible épreuve, tandis qu'autour d'elle va se mettre en place un incroyable dispositif pour ramener le corps de l'adolescent à ses parents. Le ministre israélien de la Défense, Benny Gantz leur promet que leur fils leur sera rendu, "pacifiquement ou par la force". Le gouverneur de Djénine, en coordination avec le gouvernement de l'Autorité Palestinienne à Ramallah, entreprend des pourparlers avec les ravisseurs et maintient le dialogue avec l'administration civile de Tsahal, et le coordinateur des activités de l'armée israélienne dans les territoires. Israël demande également l'aide de l'émissaire de l'Onu dans la région et les contacts partent dans tous les sens. Le maire de la localité druze de Daliat al Carmel, confirmera que des chefs du Djihad islamique à Gaza et à Beyrouth ont été contactés, mais aussi le Qatar, l'Egypte, les Etats-Unis et même la Syrie et le Liban. C'est que plusieurs facteurs se sont superposés dans cette affaire. D'abord, l'enlèvement de la dépouille de l'adolescent n'a pas été soutenu par la population palestinienne, ensuite la communauté druze a fait bloc autour de la famille de Tiran Fero et a fait agir ses contacts au-delà des frontières. En Israël, on compte environ 120.000 Druzes, citoyens israéliens. Mais leur petite communauté est aussi présente dans d'autres pays de la région, principalement en Syrie et au Liban. Et pour les Druzes, dont le culte religieux, scission de l'islam, reste secret, la loyauté envers l'Etat vient juste après celle envers leur communauté. Pendant les heures où s'est joué le drame, les Druzes israéliens ont fait bloc autour de la famille, mais certains ont dressé un barrage sur une autoroute du nord du pays et quelques-autres auraient même brièvement capturé des Palestiniens et menacé de les tuer si le corps de Tiran n'était pas rendu. Apparemment, le potentiel explosif de l'affaire a convaincu l'Autorité Palestinienne de parvenir rapidement à une solution, alors que les dirigeants israéliens redoutaient aussi de possibles dérapages qui auraient pu mettre le feu aux poudres, dans un climat sécuritaire déjà très tendu. Le double attentat mercredi à Jérusalem a relégué l'affaire au second plan, mais il est clair que l'incident était particulièrement grave et qu'il aurait pu avoir des répercussions sur le conflit et aussi sur la situation intérieure en Israël. [playlist ids="188510"] Pascale Zonszain

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