J’avais abordé très succinctement ce thème dans une rubrique qui traitait des liens entre l’alimentation et la prise de médicaments, j’y expliquais simplement qu’il fallait éviter de les avaler avec du jus de pamplemousse. Je voulais ce matin compléter mon propos et en expliquer les interactions éventuelles ou possibles et en définir les dangers réels.
Ce que nous appelons pamplemousse n’en est pas un. Celui-ci est une variété très rare en France. L’authentique pamplemousse est un fruit plus gros, présent principalement sur les étals des épiceries ou supermarchés exotiques, emballé dans du plastique ou un filet rouge sous le nom de « Pomelo de Chine ». Le pamplemousse dont nous allons parler dans cette rubrique, le pomelo, est en réalité un hybride de pamplemousse et d’orange douce. Ce fruit qui pousse en grappes, est produit en Espagne, à Chypre, en Grèce et en France depuis 1920, nous en sommes le 5ème producteur européen. On le trouve toute l’année mais la pleine saison va de décembre à mai.
Les Français ne sont pas de gros consommateurs de pamplemousses, mais des consommateurs indiscutables. Nous sommes en effet loin de la pomme (16 kilos/an/habitant), la banane (12 kgs), l’orange (10 kgs), la clémentine (8 kgs) qui arrivent en tête mais la consommation de 3 kgs/an/ménage est loin d’être anecdotique.
Ce fruit renforce les réactions de défense de l’organisme, grâce à sa richesse en antioxydants. Vous connaissez les vertus anti-infectieuses de l’EPP dont j’ai déjà parlé. Le pomelo contient 90% d’eau, il est donc peu calorique, 37 calories pour 100g, contient du calcium, du potassium, un peu de magnésium et de phosphore, des vitamines du groupe B (surtout B6 et B9) et de la vitamine C (40mg/100g). Il contrôlerait dit-on les chiffres du cholestérol et des 3-glycérides.
Les interactions sont dues à la présence de substances particulières, les furanocoumarines, surtout présentes sous l’écorce, dans la partie blanche du pomelo. Epluché, celui-ci en contient donc beaucoup moins. Le danger dont nous parlons vient par conséquent principalement des jus de fruits industriels, obtenus par pression totale du fruit.
Elles neutralisent un enzyme au nom compliqué, le cytochrome P450 3A4 pour les nombreux médecins qui nous écoutent, concentré dans l’intestin et le foie, qui joue un rôle essentiel, jusqu’à 50%, dans la dégradation des médicaments. Cet enzyme est présent en quantités variables, ce qui explique les sensibilités individuelles. La toxicité dépend donc de la concentration en furanocoumarines du fruit ou du jus et la quantité d’enzyme présente et consommée. L’ingestion régulière de pomelo épuise logiquement cet enzyme mais un seul verre peut déjà perturber sa concentration, si elle n’est pas très élevée, d’où la recommandation de n’ingérer aucun médicament (anticoagulant, anti-inflammatoire, produit de cardiologie, immunosuppresseur, psychotrope, statine) avec un jus de pamplemousse.
Des troubles du rythme ou de la conduction cardiologique, une atteinte musculaire, une toxicité rénale ou de la moelle, une thrombose veineuse. Mais il est rare qu’elles surviennent après une prise, un « one-shot ». C’est plutôt la consommation régulière de pamplemousse qui serait à l’origine de ces complications… qui surviennent plus volontiers chez des les septuagénaires et octogénaires.
Souvenons-nous cette citation de Voltaire, d’ailleurs de moins en moins vraie : « Les médecins administrent des médicaments dont ils savent très peu, à des malades dont ils savent moins, pour guérir des maladies dont ils ne savent rien ». Nous savons maintenant avec certitude qu’il faut prendre ces médicaments… avec de l’eau, pas avec un jus de pamplemousse. Et pas non plus à sec, avec un simple mouvement de la tête vers l’arrière pout faire passer la pilule. Ca sort de mon propos mais c’est dangereux également.
https://youtu.be/tHJy-JA0htk
Docteur Serge Rafal
Attention aux interactions entre les médicaments et le pamplemousse, la chronique du docteur Serge Rafal
France.
Publié le 12/09/2022 à 09h41 - Par Gabriel Attal
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