Bonjour Arié Bensemhoun, cette semaine, vous souhaitez évoquer l’éventualité d’une normalisation des relations entre Israël et le Liban.
Bonjour,
Depuis 2019, le Liban traverse l’une des pires crises économiques de l’histoire moderne :
Le PIB a chuté de plus de 60%, l’État est en situation de quasi-faillite, la majorité de la population vit sous le seuil de pauvreté, la monnaie s’est effondrée, et le pouvoir d’achat s’est évaporé. La guerre déclenchée par le Hezbollah contre Israël en soutien au Hamas n’a fait qu’aggraver une situation déjà catastrophique, plongeant encore davantage le pays dans l’abîme.
Dans ce contexte, et depuis l’effondrement de l’axe chiite, une idée longtemps impensable commence à émerger : celle d’une possible normalisation avec Israël. Autrefois totalement taboue, cette perspective progresse dans une société à bout de souffle, qui refuse de voir son avenir continuellement sacrifié sur l’autel de l’idéologie islamiste.
Lentement mais sûrement, une part croissante de la population libanaise prend conscience que nombre de ses maux depuis des décennies trouvent, directement ou indirectement, leur origine dans les ingérences étrangères, l’irrédentisme et le terrorisme palestinien.
Comme pour le reste de la région, le Liban n’échappe pas aux bouleversements du 7-octobre.
Arié, en quoi cette normalisation serait-elle bénéfique pour les Libanais ?
Ce serait à la fois un acte de survie et un choix de raison.
Sans stabilité ni apaisement avec Israël, personne n’acceptera d’investir dans un pays perçu comme un champ de bataille. Mais si la paix devenait une réalité, alors ce sont des milliards d’aides et d’investissements venus du monde entier qui pourraient affluer. Ces capitaux permettraient de relancer des secteurs aujourd’hui sinistrés, et de remettre le Liban sur les rails.
Et les précédents parlent d’eux-mêmes : l’Égypte, la Jordanie ou encore les pays signataires des Accords d’Abraham ont tous connu un essor économique spectaculaire après avoir normalisé leurs relations avec Israël. Ces accords ont généré des milliards de dollars d’échanges et créé des millions d’emplois.
Le Liban, en s’y associant, pourrait redevenir un maillon économique du Levant — un partenaire crédible au sein d’un axe régional de prospérité. Pour un pays ruiné, pour des générations entières privées d’avenir, ce serait enfin une bouffée d’espoir.
Mais l’enjeu est aussi profondément politique. Normaliser avec Israël, ce serait pour le Liban un moyen de retrouver sa pleine souveraineté. Cela permettrait à l’État de restaurer son autorité sur l’ensemble du territoire, en balayant le récit du Hezbollah qui justifie son emprise et la guerre au nom de la « résistance » contre Israël.
Ce serait, pour les Libanais, une occasion historique de reprendre le contrôle de leur destin.
Arié, cette normalisation, ce serait aussi une opportunité historique pour Israël…
Tout à fait — et Israël n’aspire qu’à cela, comme l’a récemment rappelé le ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar.
Chaque guerre déclenchée par le Hezbollah a entraîné son cortège de destructions, d’exodes et de drames humains. Mettre fin à cet engrenage, ce serait non seulement protéger les populations civiles, mais aussi ouvrir la voie à un véritable cycle de reconstruction et de stabilité régionale.
Le Hezbollah certes très affaibli, n’est pas éradiqué. Son poids politique est amoindri. C’est une opportunité qui ne demande qu’à être exploitée. Aujourd’hui, les terroristes pansent leurs plaies, mais demain. Quid de leur obsession d’anéantir Israël ?
Un accord offrirait l’opportunité de coopérer avec l’armée libanaise, et avec d’autres acteurs internationaux, pour désarmer définitivement cette menace. Ce serait un levier pour affaiblir davantage l’axe iranien et pacifier durablement la frontière nord, en soulageant Israël d’un danger constant de tirs de roquettes.
Enfin, un Liban stabilisé deviendrait aussi un partenaire stratégique de premier plan. Pour Israël, qui ambitionne de devenir un hub énergétique entre l’Europe et l’Asie, ce serait l’ouverture d’un nouveau corridor, d’un partenaire gazier, d’un débouché industriel prometteur.
Finalement Arié, cette normalisation serait bénéfique pour tout le monde…
Absolument.
Après les deux premières vagues des Accords d’Abraham, une normalisation israélo-libanaise représenterait une avancée historique majeure, porteuse d’espoir pour toute la région.
Pour le Moyen-Orient, ce serait l’occasion d’offrir la possibilité d’une nouvelle cohérence stratégique.
Pour le Liban, ce serait la sortie de l’isolement, la possibilité de redevenir un acteur respecté, attractif, tourné vers la construction plutôt que constamment entraîné dans la confrontation par une entité islamiste parasitaire. Ce serait un nouveau départ — une véritable résurrection politique et économique.
Et pour Israël, ce serait une victoire stratégique supplémentaire contre la République islamique d’Iran, un gain sécuritaire majeur. Mais surtout, cela pourrait amorcer une réaction en chaîne vertueuse de reconnaissance, dans laquelle d’autres pays — comme la Syrie, qui commence tout juste à évoquer cette perspective — pourraient à leur tour s’engager.
Comme le disait Théodore Herzl : Si vous le voulez, ce ne sera pas un rêve ! Il faut donc le souhaiter pour Israël qui célèbre aujourd’hui le 77e anniversaire de sa renaissance.
Arié Bensemhoun
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