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La chronique de Guy Konopnicki : obscurantisme et violence, les deux maux des quartiers

France.

La chronique de Guy Konopnicki : obscurantisme et violence, les deux maux des quartiers
Guy Konopnicki Crédit : Nellu Cohn/RadioJ
Le Monde daté du 8 juillet titre « Les leçons d’émeutes sans précéd ent ». Le dossier ne manque pas de pertinence, et cependant, nous y découvrons, sans grande surprise des thématiques que nous connaissions bien avant les émeutes. Il y existe bien, en France ce que Jacques Chirac nommait jadis la fracture sociale, ce que d’autres nomment pudiquement les inégalités, aggravées par la ségrégation urbaine, et pas ses conséquences sur les établissements scolaires. Les jeunes des quartiers populaires sont bien victimes de réactions et de comportements racistes, mais certainement pas de ce que la nouvelle idéologie de l’extrême-gauche nomme le « racisme systémique ». Peu de pays inscrivent la lutte contre le racisme et l’antisémitisme dans leur Constitution, et même si les moyens engagés dans ce combat ne sont pas toujours à la hauteur des enjeux, même si les politiques ont varié selon les gouvernements, la République française sanctionne les discriminations. On peut reprocher bien des choses à Emmanuel Macron, mais de déclarations en gestes spectaculaires, de priorités accordées aux écoles des quartiers difficiles en discrimination positive, il semble tout de même avoir cherché à réduire les discriminations. En fait, ce n’est pas tant en reprenant toutes les thématiques battues et rebattues de la situation dans quartiers populaires, que Le Monde nous éclaire sur les origines du mal. Dans la même édition du Monde le récit d’un procès, par la chroniqueuse judiciaire Pascale Diard occupe une double page. Ce récit n’a pas été écrit pour traiter des émeutes, et, pourtant, il décrit, mieux que toutes les doctes analyses, le décrochage social et culturel d’une partie de la population des quartiers populaires… Et il révèle l’effet direct de l’obscurantisme religieux. La scène se passe au tribunal de Bobigny, devant cette même cour, qui a vu, il y a cinquante ans, le procès historique d’une jeune femme poursuivie pour avoir interrompu sa grossesse. Soutenue par sa mère, elle-même accusée de complicité, défendue par Gisèle Halimi, cette jeune femme obtint un acquittement qui ouvrit la voie à l’adoption de la loi présentée deux ans plus tard par Simone Veil. Le nouveau procès de Bobigny est aussi celui d’une jeune femme, âgée de 18 ans au moment des faits, en 2019. Ce que l’on appelle la génération millenium, née au début du XXIème siècle, en Algérie, arrivée en France, à l’âge de treize ans avec l’espoir de faire des études. Comme la prévenue du procès historique de Bobigny, cette jeune femme se retrouve enceinte. Seulement, le père de l’enfant, qui vit avec une autre compagne, lui interdit de pratiquer un IVG, selon lui, considéré comme un crime par les lois de l’islam. La même lecture du Coran interdit aussi les relations sexuelles hors mariage, mais ça ne semble pas l’avoir gêné lors de la conception. La jeune femme cache sa grossesse et accouche sous la douche d’un appartement HLM. Elle étouffe cet « enfant de la honte », pour ne pas réveiller sa mère, qui ignore tout de la tragédie qui se joue derrière la porte de la salle de bain… Ce nouveau procès de Bobigny est celui d’un infanticide, d’une pratique qui pour nous date d’une époque lointaine, d’un temps obscur qui interdisait la contraception et l’avortement. La loi Neuwirth, légalisant la contraception date de 1967, la loi Veil légalisant l’IVG de 1975. D’autres lois permettent aux femmes de fonder ce que l’on appelle une famille monoparentale, les mères célibataires ne sont plus mises au ban de la société, elles ne sont plus ces filles mères, qui abandonnaient l’enfant du péché sur les marches des églises, ou les confiaient, comme Fantine, à quelque Thénardier. Non, le temps n’est plus, où Victor Hugo écrivait l’histoire d’une fille mère chassée de son emploi et contrainte de se livrer à la prostitution. La forêt où Jean Valjean cachait son trésor a disparu, elle se situait dans l’actuel département de la Seine Saint-Denis. En Seine Saint-Denis, aujourd’hui, la notion d’enfant de la honte existe toujours, et elle a conduit à une tragédie, jugée au tribunal de Bobigny. Ce n’est pas tout. Il y a cinquante ans, les féministes se mobilisaient pour défendre la jeune femme jugée à Bobigny et 100 000 femmes manifestaient à Paris. Aujourd’hui, de prétendues féministes, dont quelques députées d’extrême gauche, défendent le droit des femmes à vivre sous le voile imposé par la loi islamique. Elles se foutent de la malheureuse jeune femme jugée à Bobigny, comme elle se foutent des Iraniennes et des Afghanes. Oh, bien sûr, la République Française a bien des défauts, elle n’a pas réussi à réduire la fracture sociale et culturelle qui isole une partie de la jeunesse des quartiers. À Bobigny, Seine Saint-Denis, le procès d’une jeune franco-algérienne nous décrit cette fameuse fracture. Dans un appartement de Seine Saint-Denis, une femme a vécu dans la honte sa sexualité et sa grossesse, elle accouché, seule en silence, dans sa salle de bain, elle est descendue sans bruit jusqu’au local poubelle pour se débarrasser de l’enfant. En Seine Saint-Denis, aujourd’hui, des jeunes femmes vivent sous la terreur des lois obscurantistes. Et tant que l’on fermera les yeux sur l’emprise des idéologies obscures sur les jeunes des banlieues, on refusera de comprendre les poussées barbares. Guy Konopnicki

konop90723

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