Arié Bensemhoun, c’est de l’accord historique entre Israël et le Liban sur le gaz dont vous allez parler aujourd’hui ?
En effet. Après des années de négociations, les gouvernements israélien et libanais ont annoncé mardi 11 octobre être tombés d’accord sur la délimitation de leur frontière maritime. Washington, qui mène depuis deux ans une médiation entre les deux voisins officiellement en état de guerre, a salué une « avancée historique », tandis que Beyrouth, qui a jugé la proposition « satisfaisante », veut examiner la version arabe du texte pour annoncer sa position officielle.
Le premier ministre libanais, Najib Mikati, a demandé aux représentants de TotalEnergies de « prendre immédiatement les mesures opérationnelles pour le forage d’exploration dans les eaux libanaises », a annoncé un communiqué de son bureau.
Pourtant, l’accord a failli mal tourner le week-end dernier ?
Oui, il s’en est fallu de peu. La tension est montée d’un cran, dimanche, entre Israël et le Liban. Alors que le ministère israélien de l'Energie avait donné son feu vert à la société britannique Energean pour lancer les tests de sa plate-forme flottante d'exploitation (FPSO), le Hezbollah a menacé d'attaquer Israël si l'exploitation de Karish devait commencer avant qu'un accord ne soit signé. En juillet, après l'arrivée de la FPSO d'Energean au large d'Haïfa, la milice chiite avait lancé trois drones en direction de l'installation, interceptés par l'armée israélienne.
Israël et le Liban avaient signifié au début du mois d’octobre leur satisfaction à un projet d’accord du médiateur américain Amos Hochstein. Toutefois, Israël avait affirmé son refus d’une série d’amendements libanais au projet d’accord, ce qui avait douché les espoirs. Les négociations en coulisse se sont poursuivies ces derniers jours et Israël a expliqué mardi avoir reçu une réponse favorable à ses préoccupations sur les demandes d’amendements libanais.
Pourquoi le Hezbollah s’est-il immiscé dans les négociations ?
Les menaces du Hezbollah font en quelque sorte partie du jeu et sont avant tout destinées à l'opinion publique libanaise pour convaincre celle-ci qu'il est le seul à défendre les intérêts libanais face à l'ennemi israélien. Mais une menace rhétorique est toujours susceptible de se concrétiser... Il est donc plus prudent de prendre ces menaces au sérieux.
Le ministre de la Défense Benny Gantz, a de son côté, avait déclaré samedi : « Si le Hezbollah commet une faute ou attaque Israël d'une quelconque manière, nous détruirons le Liban. »
Le Liban et Israël se disputent une zone maritime de 860 kilomètres carrés. Cette zone est riche en gaz naturel et en pétrole. Cinq sessions de négociations indirectes ont été organisées sur la question à partir de 2020, sous le parrainage de l'ONU et la médiation des États-Unis, la dernière s'étant tenue en mai 2021.
Quels sont les enjeux pour les deux pays?
Dans un contexte où l’Union européenne cherche à diversifier ses approvisionnements en gaz en raison de l’invasion russe de l’Ukraine, Israël mise sur le gisement de Karish, prêt à entrer en production, pour doper ses livraisons de gaz au Vieux Continent.
L’accord permet à la fois de préserver les intérêts stratégiques israéliens et démontrer que les parties libanaises présentes ont réussi à adopter une position commune, chose absolument inouïe dans la vie politique libanaise actuellement.
Pour les deux pays, l’enjeu est de taille. Michel Aoun, le président libanais, qui achève son mandat à la fin du mois, veut partir la tête haute avec la signature d'un accord sur le gaz, lequel constitue un atout économique à moyen terme. En Israël, cet accord est devenu un enjeu des élections du 1er novembre.
La grogne monte également au sein de l’opposition israélienne....
Le chef de l'opposition, Benyamin Netanyahou a déclaré que Yaïr Lapid cédait à toutes les exigences du Hezbollah et que lui ne serait pas engagé par cet accord s'il revenait au pouvoir. Il a ainsi accusé le Premier ministre de « donner » au Liban un « territoire souverain d’Israël », de « capituler » face au Hezbollah libanais.
Mardi, des responsables israéliens ont précisé que l’accord allait être présenté au Parlement, sans fournir de date précise. Selon des informations de presse et des responsables, le texte prévoit que le gisement offshore de Karish soit sous contrôle d’Israël et que les réserves de Cana, situées plus au nord-est, soient octroyées au Liban.
Comment Israël peut-il se prémunir contre d’éventuels risques sécuritaires ?
Israël recevra du gouvernement américain une lettre certifiant que les États-Unis sont attachés à la sécurité et aux droits économiques d’Israël dans un scénario où le Hezbollah ou une autre partie déciderait de contester l'accord qui a été signé entre Israël et le Liban sur la frontière maritime.
Cet accord historique avec l'État libanais devrait protéger tous les intérêts sécuritaires d'Israël et répondre à toutes les exigences du système de sécurité.
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Arié Bensemhoun
Israël / Liban : un accord historique sur le gaz, la chronique d'Arié Bensemhoun
Israël.
Publié le 13/10/2022 à 10h39 - Par Gabriel Attal
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