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Nouvel éloge de la fourrure, la chronique de Guy Konopnicki

France.

Nouvel éloge de la fourrure, la chronique de Guy Konopnicki
(Crédit: DR)

Le Sénat et l’Assemblée nationale s’accordent sur un texte, un tel consensus mériterait d’être salué, s’il ne s’agissait d’un loi hypocrite adoptée parce qu’à la veille d’une élection majeure, aucun candidat ne prend le risque de passer pour un monstre, insensible à la souffrance animale…

N'étant candidat à rien, je crains d’autant moins d’être accusé de cruauté, que je contribue régulièrement à la sauvegarde d’une espèce, le cheval, qui eût disparu de nos contrées, sans le PMU, cette belle institution qui assure la survie de quelques centaines de milliers d’équidés. Par chance, la loi adoptée hier ne prive pas les jockeys de la cravache d’or, symbole s’il en fut de la violence exercée par l’homme sur la bête. La loi n’interdit pas non plus de porter atteinte à la dignité du cheval, en le faisant hongre… 

Qu’on se rassure, le prochain Président de la République se rendra en juin à Vincennes, au trot, et en avril à Auteuil, à l’obstacle, pour le prix associé à sa fonction. 

Cependant, l’indignation sélective, à laquelle nous sommes habitués quand il s’agit des causes humaines s’applique désormais, dans la loi, aux animaux. 

Les sénateurs et les députés n’épargnent ni les cerfs ni les lièvres, ni les oiseaux, et pas même les promeneurs qui s’aventurent en forêt le dimanche lorsque la chasse est ouverte. La nouvelle loi protège certaines espèces sauvages, on ne fera pas de mal au loup, qui, de son côté n’épargne pas les brebis et les agneaux.

En revanche, l’élevage de bêtes pour la fourrure sera strictement interdit en France. On ne touchera pas non plus à la corrida, il y a trop de sièges en jeu, de Nîmes à Bayonne… On peut bien sacrifier le taureau, pourvu que l’on sauve le vison d’élevage…

Désolé de récidiver ici, j’ai écrit et publié, en 1996, un Éloge de la Fourrure, toujours disponible en édition numérique. Je persiste et signe.

L’interdiction de la fourrure n’est pas seulement une faute de goût, une atteinte à la beauté, c’est une aberration écologique.

Certes, les quatre entreprises artisanales d’élevage de vison ne représentent pas grand-chose dans l’arithmétique électorale. Les pelletiers et les fourreurs disparaissent de nos rues, on cherchera en vain leur trace, entre la rue d’Hauteville et le Faubourg Poissonnière.

Madame Barbara Pompili a donc pu faire adopter un texte qui ne condamne que les derniers artisans. C’était un beau métier, mais elle n’est guère partagée notre nostalgie des ateliers, des peaux que l’on étire sur des planches, des gestes méticuleux de la coupe et de la couture manuelle. 

Des années de campagnes mensongères ont fait passer les fourreurs pour des monstres, et qu’importe si la France doit l’abolition de la peine de mort à un fils de fourreur, Robert Badinter.

Les larmes vont au pauvre petit vison, au chinchilla, à la zibeline et même au fœtus d’agneau d’Astrakan.

Matière renouvelable, utilisable pendant plusieurs dizaines d’années, la fourrure doit disparaître. Qu’importe si des espèces disparaissent avec elle. On ne porte pas la peau d’un animal. C’est affreux. On préfère arroser de pétrole les ragondins en surnombre dans les marais. Ça, c’est écologique !

A la place des manteaux et des manchons, on porte d’affreux oripeaux de fibres synthétiques. Les larmes ne vont pas aux fillettes de moins de douze ans, qui travaillent douze heures par jour, pour un dollar, dans les bagnes industriels de l’Asie. La fourrure, quelle horreur !

Pauvres animaux ! Bien sûr on ne compte pas ceux qui disparaissent partout où l’on fabrique des fibres synthétiques, en rejetant des tonnes de produits chimiques dans les rivières et en lâchant des fumées toxiques dans l’atmosphère.

Elles sont loin, ces usines qui ravagent les fleuves de l’Asie, détruisent la faune et la flore et rendent l’eau impropre à la consommation. Puisque c’est la mode, parlons donc de l’empreinte carbone du vêtement synthétique ! La fabrication de de ces fibres, leur assemblage, leur transport sur les océans contribue au réchauffement climatique. Mais il en était à peine question à Glasgow.

L’écologie, cela consisterait donc à porter des vêtements dont les matières proviennent de la décantation des hydrocarbures, et dont l’assemblage génère des tonnes de gaz carbonique.

Mais porter une peau de bête, quelle horreur, cela vous vaudra des insultes et parfois même, des agressions, dans les rues.

Alors, l’Assemblée nationale et le Sénat ont tranquillement adopté une loi, interdisant l’élevage des visons et autres bêtes à fourrure. Tant pis pour la diversité des activités rurales, pour les emplois. Et, comme la fourrure elle-même n’est pas interdite, on fera peu de cas de ce « fabriquons français » dont on nous parle tant. Les derniers fourreurs devront importer des peaux, du moins celles que l’Union Européenne autorise encore…

La pensée bébête triomphe. La sensiblerie fait disparaître une activité artisanale, au profit d’une industrie gigantesque et polluante. 

Qu’importe la beauté, l’élégance, l’humanité s’enlaidit dans les fringues de marques, devenues autant d’uniformes… Le tout, figurez-vous au nom de l’écologie…

Guy Konopnicki

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