J'ai reçu une piqure de sionisme

Israël.

J'ai reçu une piqure de sionisme
(Crédit: DR)

Officiellement, la vaccination en Israël s'adresse dans un premier temps aux personnes âgées, aux sujets à risque, aux personnels soignants et autres professions essentielles. Dans la pratique, les doses de vaccins doivent être utilisées le plus vite possible une fois ouvertes. Alors, en fin de journée, après les patients dument enregistrés, les centres de vaccination acceptent de vacciner avec ce qui leur reste de doses, ceux qui arrivent sans rendez-vous, quel que soit leur âge.  Evidemment, rien n'est garanti, mais on peut toujours tenter sa chance. C'est ce que j'ai fait samedi soir.

C'est le stade couvert Arena, dans le quartier de Malha à Jérusalem, qui accueille les patients de deux caisses d'assurance-maladie. Un complexe ultra-moderne, illuminé comme un soir de match. A l'entrée, deux jeunes filles et un vigile emmitouflés dans leurs blousons vérifient les convocations. Comme des physionomistes de boite de nuit, ils font passer d'abord les plus âgés. Ce sont eux, les VIP du club. Les autres attendent patiemment sur le côté, le droit de pénétrer dans le carré réservé. Voûtés l'un sur l'autre, un couple de religieux a l'air de s'appuyer sur la même canne. Les gens s'écartent pour les laisser passer. Un jeune homme, le visage masqué, tient sa grand-mère par le bras. Quand mon tour arrive, on m'adresse à une employée derrière son guichet qui vérifie sur son ordinateur, s'il reste une dose pour moi. En moins de trois minutes, je me retrouve dans une alvéole où officie Ronit, l'infirmière qui va s'occuper de moi, comme si j'étais sa seule patiente de la soirée. Après m'avoir enregistrée sur son ordinateur, elle passe à un interrogatoire en règle : allergie, problèmes médicaux, traitement, vaccins récents. Puis elle m'explique les effets secondaires possibles à surveiller. Et c'est seulement quand elle s'est assuré que j'ai tout compris, qu'elle procède à l'injection. En quelques secondes, c'est fini. Je n'ai rien senti. Ronit me demande d'aller m'asseoir un quart d'heure avant de rentrer chez moi et me gratifie de ses vœux de bonne santé, comme si nous étions de vieilles amies.

Dans le hall, une quinzaine de personnes, assises à bonne distance les unes des autres, échangent leur expérience, se prennent en photo pour montrer à la famille et aux amis qu'ils ont eu leur premier vaccin. D'ailleurs, leur téléphone grésille déjà du SMS qui leur indique leur rendez-vous pour la deuxième injection. Encore trois semaines, et je vais pouvoir retrouver mes petits-enfants, se réjouit une dame pelotonnée dans son manteau d'hiver trop grand pour elle. Dehors, l'air de la nuit de Jérusalem semble plus léger. On se quitte avec le sourire complice de ceux qui ont surmonté une épreuve et qui retrouvent leur optimisme. Les trois physionomistes à l'entrée se réchauffent les mains autour d'un gobelet de café brûlant.

Tout est calme. L'organisation bien huilée rassure. On se sent soulagé, et un peu fier aussi que ça fonctionne si bien. Ça fait un peu penser à ce qu'on ressent à la fête de l'Indépendance, ou à la cérémonie de fin de classes des jeunes recrues de Tsahal. Une espèce de fierté familiale. Samedi soir, je crois qu'en fait j'ai reçu une piqure de sionisme.

Pascale Zonszain

pzoom040121

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