Cette femme se présente pour se défendre comme une victime de sa famille radicalisée et terroriste. L’État la considère comme «une menace grave à l'ordre public». La justice a examiné mercredi 13 septembre la question de l'expulsion d'une Roubaisienne partie mineure en Syrie avec sa famille, de retour en France avec ses deux filles.
La jeune femme, 24 ans, appartient à la famille Tahar Aouidate, l'«une des plus grandes familles jihadistes françaises» Des liens aussi avec Abaaoud. De l’argent des allocations familiales envoyé en Syrie
Une famille dont pas moins de 23 membres ont rejoint l'organisation État islamique (EI). L’institution rendra son avis le 27 septembre. Parmi eux figure Fodil Tahar Aouidate, son oncle, l'un des onze Français condamnés à mort en Irak en 2019, pour trafic d'esclaves, et connu du renseignement pour ses liens avec Abdelhamid Abaaoud, le coordinateur des attentats du 13 novembre 2015. Deux de ses tantes ont aussi été condamnées en France pour «financement du terrorisme» pour avoir, selon le tribunal, envoyé 15.000 euros en Syrie, notamment des allocations familiales.
Une menace grave pour la République française
De retour en France, cette femme espère rester dans son pays de naissance, mais n'en a pas la nationalité. Sa mère a refusé de la lui demander à l'adolescence, faisant d'elle aujourd'hui une ressortissante algérienne en situation irrégulière. «J'affirme qu'elle constitue aujourd'hui une menace grave pour la République française»,estime le préfet pour justifier sa procèdure d’expulsion. Son rire quand elle évoque une décapitation lors d'une audition avec la DGSI, une considération sur les chiites qui «sont des malades» lors des mêmes échanges ou encore «un lien pas rompu avec son relationnel djihadiste» inquiètent considérablement.
La Takya, double face de la djihadiste
Tous ces éléments semblent être «un processus de dissimulation», ou «taqiya», et le préfet insiste sur ses «ambiguïtés» avec l'islamisme.La jeune femme «n'apporte aucun élément probant corroborant une condamnation de sa part des actes de terrorisme commis par les membres de la communauté à laquelle elle a appartenu». «Je ne comprends pas cette obstination de la préfecture», répond son avocate, Marie Dosé, pour qui sa cliente qui s'est constituée partie civile contre sa famille, n'a fait que subir son enfance puis son séjour en zone irako-syrienne. L’avocate a plaidé la déscolarisation à 13 ans, le voile intégral, l'interdiction de regarder à travers la fenêtre de sa chambre, les coups. Marie Dosé requalifie le mariage forcé de viol et insiste sur la volonté de la jeune femme de fuir l'EI.
«Je viens d'une famille tyrannique que je n'ai pas choisie» la revenante de Syrie
Dans une lettre lue à l'audience la jeune femme.«Je ne suis ni un danger, ni une menace. Simplement encore cette petite fille à qui on a volé son enfance» «Mon plus grand rêve, c'est d'aller à Disneyland avec mes filles.» «Deux petites filles» actuellement placées, «qui n'ont rien demandé», et pour qui, souligne Marie Dosé, l'«affaire recèle un enjeu considérable». La justice n’a semblé être particulièrement sensible à ce discours misérabiliste et devrait décider l’expulsion de la djihadiste revenante.
Michel Zerbib
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