Le débat sur la constitution qui n'existe pas

Israël.

Le débat sur la constitution qui n'existe pas
La cour suprême d'Israël - Cour suprême israélienne

On a assisté hier à un débat exceptionnel devant la Cour Suprême israélienne. Une audience impressionnante et passionnante. Toutes les questions qui ont été évoquées sont les mêmes depuis la création de l'Etat d'Israël, celles qui pouvaient se poser déjà à l'époque de la brève assemblée constituante qui avait précédé la Knesset et même dans les mois qui avaient précédé l'indépendance. Et d'ailleurs on a beaucoup parlé de la Déclaration d'Indépendance et de son rôle, sachant qu'Israël n'a toujours pas de constitution écrite. Est-ce que la Déclaration d'Indépendance a une valeur légale, est-elle une source du droit public d'Israël ? Et surtout, évidemment la question des compétences de la Cour Suprême.  A-t-elle le droit d'annuler une loi fondamentale ? Et est-ce que la Knesset a le droit de limiter les attributions de la Cour Suprême et des institutions judiciaires en général ? Comment s'assurer que les ministres agiront de façon raisonnable, s'il n'y a aucune autorité pour contrôler ou analyser leurs décisions ? Et au-delà, qu'est-ce qui sera l'atteinte la plus grave à la démocratie : annuler la loi ou la laisser en place ? Les juges ont posé toutes ces questions aux requérants et aux défendeurs. Maintenant, ils vont étudier leurs réponses.

La décision n'interviendra probablement pas avant de longues semaines. Entretemps, la balle repasse du camp judiciaire vers le camp politique. La Knesset est toujours en vacances jusqu'à la fin octobre. Mais le président de l'Etat ne renonce pas à concilier les positions de la majorité et de l'opposition autour d'un compromis. Jusqu'à présent, ses tentatives ont échoué. Parallèlement, Benyamin Netanyahou tente sa propre formule de règlement, qui permettrait de suspendre la réforme en échange de concessions de l'opposition.  Le chef du gouvernement a fait passer des projets de texte chez le président qui les a relayés à l'opposition, en fait surtout au parti de Benny Gantz, le seul qui soit disposé à ne pas claquer la porte. Mais il y a un obstacle encore infranchissable : l'opposition veut la signature de Netanyahou au bas du document avant d'accepter de discuter. Le Premier ministre veut d'abord que l'opposition dise OK au dialogue avant de s'engager sur une proposition. Et pour le moment, ça tourne en rond. Sinon, le Premier ministre envisage aussi une formule unilatérale, c'est-à-dire un nouveau projet de loi en version allégée, qu'il pourrait faire voter à la rentrée parlementaire et qui aurait au moins l'appui de la société civile. Mais là non plus, ça n'avance pas vraiment. Ce qui ne veut pas dire que la partie est perdue. Même si Netanyahou sait qu'une réforme trop diluée risque de faire exploser sa coalition. Mais cela arrêterait aussi le débat à la Cour Suprême.

Et s'il n'y a pas de compromis sur la réforme judiciaire, tout continue comme depuis neuf mois. Le travail parlementaire reprendra dans quelques semaines. La suite de la réforme viendra au vote, notamment la modification du mode de nomination des juges. Les manifestations se poursuivront avec toujours une incertitude politique et une détérioration du débat public. Entretemps, il est très probable que rien n'avance sur le plan diplomatique, puisque l'administration Biden a fait comprendre à Benyamin Netanyahou qu'il serait très difficile d'avancer dans la normalisation avec l'Arabie Saoudite tant que le Premier ministre a un incendie dans son arrière-cour. Mais surtout, cela signifie que la crise constitutionnelle va s'aggraver, quelle que soit la décision que rendra la Cour Suprême.

Pascale Zonszain

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