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Avant le verdict : encore beaucoup de zones d’ombres, la chronique judiciaire de Michel Zerbib

France.

Avant le verdict : encore beaucoup de zones d’ombres, la chronique judiciaire de Michel Zerbib
(Crédit : Twitter)

Salah Abdeslam a-t-il tout dit ? Mardi lors de dernière prise de parole , il a juré qu’il n’était ni un tueur ni un assassin. Muet durant l’instruction, il était arrogant au début du procès : je suis un combattant de l’Etat islamique avait il déclaré. Au fur et à mesure des interrogatoires, le seul membre encore en vie des commandos du 13-Novembre a finalement expliqué à la cour qu’il avait pour mission de se faire exploser dans un bar du XVIIIe arrondissement de Paris, mais qu’il avait volontairement renoncé à le faire « par humanité ». Celui que l’on a vu pleurer à l’audience a même fini par demander pardon. Pardon … Mais il n’ a toujours pas renié Daesh.

Bien sur que non il n'a pas tout dit. Salah Abdeslam a nié avoir été informé du projet d’attentat des membres du commando venus de Syrie qu’il est allé chercher en Allemagne et en Hongrie, en août et octobre 2015. « C’était des rapatriements humanitaires », a-t-il dit en osant une comparaison honteuse avec la guerre en Ukraine. Tout cela n’a pas vraiment convaincu l’accusation. « Que les choses soient claires, nous ne croyons pas un instant à cette fable », a répondu Nicolas Le Bris, avocat général, lors des réquisitions. « C’est une mission-clé : sans terroristes, pas d’attentats. Celui qui rapatrie les commandos est nécessairement quelqu’un en qui la cellule place toute sa confiance », a argué de son côté Camille Hennetier, du Parquet national antiterroriste. Salah Abdeslam est également resté vague sur la cible qui lui a été attribuée le 13 novembre 2015 : « Je ne me souviens pas », a-t-il répondu. Selon lui, ce n’est que deux jours avant les attentats qu’Abdelhamid Abaaoud, le chef opérationnel des commandos, lui a demandé de porter une ceinture explosive. Peu crédible . Après avoir déposé les kamikazes du Stade de France, il a raconté être revenu à Paris pour accomplir sa mission. « Je rentre dans le café, un bar pas très grand, avec beaucoup de monde. Je m’installe, je commande une boisson. Je regarde les gens autour de moi et je me dis que je vais pas le faire. J’ai renoncé par humanité, pas par peur. Je ne voulais pas les tuer ». Cour circonspecte. Savait-il que sa ceinture explosive était défectueuse ou a-t-il inventé une histoire en le découvrant ?Autre question sans réponse, pourquoi Salah Abdeslam aurait-il agi seul, alors que les commandos du Bataclan, des terrasses et du Stade de France étaient composés de trois personnes ?

D'où venaient les kalachnikov ? Ce bruit terrible des mitraillettes. Les rescapés des attaques du Bataclan ou des terrasses ont tous rappelé à la barre le son des armes utilisées par les assaillants du 13-Novembre. Mais d’où venaient ces kalachnikovs ? Sur le sujet, il faudra se contenter des explications lacunaires et pas toujours convaincantes des enquêteurs belges qui ont témoigné par visioconférence depuis Bruxelles. Ils ont dit qu’une semaine avant les attentats, l’un des accusés, Mohamed Bakkali, aurait pris contact avec un certain Mohammed E. pour se procurer six kalachnikovs.

Cet homme qui a été interpellé en Belgique Mohammed E. n’est pas jugé à Paris. Une enquêtrice belge a évoqué des contacts avec des Kurdes et des Tchétchènes dans la région de Liège. Pas confirmé non plus .Une autre piste a mené à Rotterdam (Pays-Bas) et à Ali El Haddad Asufi, un autre des accusés du procès. L’enquête a démontré qu’en octobre 2015, il cherchait à se procurer des « Clio » auprès d’un de ses cousins. Des « Clio » ? Mais pour les enquêteurs, il est plus vraisemblable que le nom « Clio » cachait en fait un achat de kalachnikovs. Mais ils n’en ont pas la preuve.

Roissy et Schiphol étaient-ils visés ? L’enquête a démontré que les dix membres des commandos et Mohamed Abrini se rendaient en région parisienne le 12 novembre .D’autres membres de la cellule jihadiste étaient restés à Bruxelles pour coordonner leurs attaques. On sait que deux accusés le Suédois Osama Krayem et le Tunisien Sofien Ayari ont fait un aller-retour à Amsterdam le 13 novembre, quelques heures avant les attaques à Paris et à Saint-Denis. Un attentat était-il prévu à l’aéroport de Schiphol (cible possible, des avions d’El Al) le 13 novembre ou ultérieurement ? À l’audience, Osama Krayem et Sofien Ayari n’ont voulu rien dire . Dans un ordinateur «conspiratif» récupéré dans une poubelle à Bruxelles en mars 2016, les enquêteurs ont retrouvé un dossier « 13-Novembre », créé six jours avant les attaques, avec cinq sous-dossiers, dont un baptisé « Groupe Schiphol ».

Autre mystère : le 13 novembre, dans l’après-midi, la voiture qu’a utilisé Salah Abdeslam pour déposer les kamikazes du Stade de France a fait une pause près du terminal 2 de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle. S’agissait-il de récupérer ou de déposer quelqu’un ? De préparer une action ? Près de dix mois d’audience n’ont pas permis de répondre à toutes ces questions. Ce soir le verdict très attendu d’un procès qui n’aura donc pas livré tous ses secrets.

https://youtu.be/5Da5KJy3YL8

Michel Zerbib

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