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132e journée : on a parlé de Nuremberg et d’Elie Wiesel, la chronique de Michel Zerbib

France.

132e journée : on a parlé de Nuremberg et d’Elie Wiesel, la chronique de Michel Zerbib
(Crédit : Twitter)

C’est d’ailleurs Me Patrick Klugman qui a ouvert le bal des plaidoiries de parties civiles. "Je plaide pour Paris », a tonné avec fierté l’ancien président de l’UEJF "Les attentats n'ont pas eu lieu à Paris, mais contre Paris". Fier de défendre sa ville, l'avocat a rappelle que la capitale a été "frappée dans ses entrailles, dans ses artères, dans sa jeunesse". D’ailleurs les terroristes l'ont décrite comme "la capitale des abominations et de la perversion". Il s’est adressé aux accusés, "vous avez perdu. Vous avez voulu nous tuer, mais nous sommes de ce côté, debout et ensemble". "Nous étions une ville, nous sommes maintenant une force, une mémoire. Paris est votre démenti Paris est votre défaite". Le but, est de faire admettre Paris comme partie civile.

Axel Metzker a cité d’abord Hans Frank, le seul accusé du procès de Nuremberg en 1945, dit-il, à avoir reconnu sa responsabilité dans l'extermination des Juifs. « Le survivant a des leçons à nous donner . Chaque témoignage est un moment de grâce . La principale réussite de ce procès est d’avoir donné la parole aux victimes  »Comme cette jeune fille qui a survécu à un crash d'avion en direction vers les Comores.Le docteur en droit a évoqué aussi les orphelins qui ont perdu leurs parents lors de l'attentat du 11-Septembre à New York. On sent qu'il veut inscrire le 13-Novembre dans la grande Histoire. « Espérons qu'un mémorial du 13 puisse voir le jour. » « Je vais vous parler d'un survivant », poursuit Me Metzker. Son parcours est celui d'un "évadé du Bataclan". Sur une vidéo, on le voit courir passage Amelot, "la rue la plus longue de Paris" aux dires des survivants du Bataclan.

Il était dans les toilettes quand les détonations ont commencé. En sortant, il ne trouve plus son ami avec lequel il est venu au concert. Il entend : "Ils ont des kalach', ils ont des kalach' !" En sortant par une sortie de secours, il trébuche sur un corps, celui d'un homme. Il se cache sous un porche. Entend des tirs. Il court passage Amelot. Il essaie d'avertir les gens du danger, mais personne ne l'écoute.

Il court, court sans se retourner comme Dustin Hoffman dans Marathon Man. Jusqu'à l'épuisement, rue de Rivoli. Il attendra 24 heures pour raconter l'histoire à ses parents et sa petite sœur qui "font bloc avec lui et sont des victimes à part entière".

Me Metzker s'insurge contre le Fonds de garantie dont on comprend qu'il n'a pas indemnisé son client à la hauteur de son préjudice. "Ma vie c'est de la merde", m'a dit mon client. « Il a honte. Il a tout pour lui, mais il a vu la mort en face ». Ses parents font tout pour l'aider face à "sa dépression", face à "ses envies suicidaires". Il a été hospitalisé tout récemment. « Il alterne entre espoir et désespoir », alors "qu’à 28 ans, on doit jouir de la vie. Il a même fait un infarctus ! A son âge ! », dit l'avocat. 
Pour lui, « le gouvernement doit dissoudre le fonds de garantie et tout recommencer ».

« David, Jérôme et Nicolas avaient déjà vu les Eagles of Death Metal en concert au Trianon. Ce soir du 13-Novembre, ils trouvent le groupe moins bon. Ils sortent fumer une cigarette. Puis rentrent dans la salle. David se retrouve à terre. Il cherche une sortie. En voit une qu’il rejoint en rampant. Il monte un escalier. Et décide de bloquer la porte avec un frigo pour empêcher la progression des terroristes et se hisse sur le toit. »raconte Me Ghozland

Pris dans l'attaque du Bataclan, Nicolas prend conscience de la situation. Il entend des tirs. « J’ai essayé de m'emmitoufler sous une jambe. Il sent du sang couler sur son visage ». Il a reçu des extraits de balles dans la jambe et le dos poursuit l’avocat .

"On ne choisit pas d’être une victime du terrorisme", explique Me Ghozlan. Pour David, Jérôme et Nicolas, dans les années qui ont suivi, "ça a été l’isolement, les paroles maladroites qu'ils ont entendues et la difficulté de reprendre une vie". Ses trois clients ne voulaient pas s’exprimer à l’audience. "Et je n’avais pas prévu de prendre la parole non plus, dit l’avocat. Mais j’ai repensé à un survivant des Camps (de la Mort) qui est décédé récemment (Elie Buzyn) et qui disait aux gens devant qui il parlait : vous êtes les témoins des témoins".

Sacha Ghozland , lui aussi ancien président des étudiants Juifs, va citer deux écrivains survivants des camps de concentration « sans comparer  » dit-il. Elie Wiesel et Jorge Semprun qui ont dialogué :se taire est interdit, parler est impossible … comment faire pour dire ce qu’il faut. Le jeune avocat s’adresse à la cour pour conclure « je souhaite que leur silence deviennent vos mots et brisent le tourbillon de violences et de silences  »

Un autre avocat , Me Baron nous a parlé de Pascal. Allongé sur le sol du Bataclan, il s'est retrouvé dans une flaque de sang. "Il s'est dit que ce ne devait pas être le sien, puisqu'il n'avait pas mal. Il s'est dit qu'il préférait mourir plutôt qu’être tétraplégique". "Il a tout entendu de l'attaque" car Pascal est ressorti parmi les tout derniers, après l’assaut de la BRI. Sans avoir été physiquement blessé, mais, comme beaucoup, traumatisé. Aujourd'hui, il préfère se taire et a beaucoup de mal à en parler.

Très théâtral, Me Baron détaille tous les éléments d'enquête disponibles sur le parcours de Salah Abdeslam. Il a rappelé que le gilet explosif abandonné à Montrouge a été jugé dysfonctionnel par les experts. Et se souvient que l'accusé l'a également dit à ses amis. "Mais comment pouvait-il le savoir s'il n'avait pas essayé de l'activer ?", fait remarquer l'avocat. Il en arrive à la conclusion que l'accusé n'a pas dit la vérité lorsqu'il a prétendu à l'audience qu'il avait renoncé à se faire exploser "par humanité". Les audiences reprennent mardi.

https://youtu.be/TlrQIXufVPs

Michel Zerbib

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