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Fatigue démocratique, la chronique de Guy Konopnicki

France.

Fatigue démocratique, la chronique de Guy Konopnicki
(Crédit : DR)

Plus nous approchons de l’élection présidentielle et plus nous sommes abreuvés de sondages… Comme au PMU, quand le favori se détache nettement des autres partants, l’attention se porte sur la deuxième place, très disputée, sur un terrain très lourd, entre droite et extrême-droite.

De la multiplication des sondages, des commentaires et des débats qu’ils suscitent, on pourrait déduire que les Français se passionnent toujours pour la politique et particulièrement pour l’élection présidentielle, scrutin majeur de la Vème République.

Or, Le Figaro a publié mardi une étude du CEVIPOF, le centre de recherches de Sciences Po, qui porte non sur le choix du candidat mais sur les relations des Français avec la politique et les institutions. Ce type d’enquête, menée avec le concours d’Opinion Way porte non pas sur un échantillon d’un millier de personnes contactées par un moyen numérique, mais sur un peu plus de 10 000… On peut considérer qu’il donne une image fiable de l’état d’esprit des Français.

Les résultats de cette étude sont proprement catastrophiques pour la démocratie. Il ne se trouve que 15% de citoyens pour se sentir en confiance dans l’actuel système institutionnel. Une écrasante majorité se situe entre morosité, défiance et lassitude.

Quand on entre dans le détail des institutions, le pays affiche un bien étrange divorce entre sa vision et sa pratique.

La seule institution qui recueille une majorité d’opinions favorables est la marie, le conseil municipal… Petite majorité, tout de même 52%... Or les élections municipales sont les moins suivies, et les derniers scrutins ont battu tous les records d’abstention.

Les Français font confiance au maire mais ne se jugent pas utile de participer à son élection. Ils réclament plus de démocratie locale, mais se gardent bien d’y participer.

L’institution qui éveille le plus de méfiance est le président de la République. Un tiers des Français, à peine, jugent utile ce président élu au suffrage universel. Les deux tiers se répartissent entre l’indifférence, la méfiance et l’hostilité au système. Or, depuis la fin de l’été et pour les trois mois à venir, les médias et les réseaux sociaux parlent tous les jours et à toute heure de l’élection présidentielle et de chacun des candidats. Les Français écoutent d’une oreille distraite et voteront, pour la plupart, sans plus d’illusions.

Mais il y a plus inquiétant encore.

Quand on interroge les Français sur les systèmes alternatifs à la démocratie, et les bonnes façons de gouverner, 52% verraient bien un gouvernement d’experts…

Et, après avoir exprimé leur défiance vis-à-vis du système présidentiel, 39% des Français confieraient volontiers le pouvoir à un homme fort, qui n’aurait pas à se préoccuper du parlement ou de l’élection !

Autrement dit, un dictateur !

Pendant que nous y sommes, puisque la dictature fait rêver, ils sont 27% qui confieraient volontiers le pouvoir à l’armée… Sans doute est-ce la conséquence de la suppression du service militaire, il y a vingt ans que les jeunes français ne sont plus confrontés à la réalité de l’armée et de sa bureaucratie absurde… 

La méconnaissance de l’histoire fait le reste, les Français ont oublié les horreurs de la monarchie absolue et les catastrophes dues à l’incapacité des généraux, centrés sur le nombril de la France, ils ne voient pas la corruption et la misère des pays contrôlés par l’armée, de la Birmanie à l’Algérie, ni la violence des régimes africains issus de coup d’états militaires… Angoissés par les flux migratoires, une part non négligeable de Français se prennent à rêver des système politiques qui les provoquent !

L’état de l’opinion mesuré par le CEVIPOF est plus angoissant que tous les sondages qui prédisent un score sans précédent de l’extrême droite, et la quasi-disparition de la gauche démocratique…

Les Français sont donc las de la République et de la démocratie, ils ne demandent pas plus de pouvoir pour le peuple, ils seraient prêts à remettre le pouvoir des experts, à un homme fort et même à l’armée…

Les fautes des présidents et des gouvernements successifs sont grandes, à n’en pas douter. L’offre politique de la présidentielle est indigente. Mais nous voici contraints de répéter le mot fameux de Churchill, la démocratie est plus mauvais des systèmes, à l’exception de tous les autres, en espérant que les vents mauvais retombent…

Guy Konopnicki

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