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Un fils endeuillé qui témoigne pour sa mère, la force et la dignité de Daniel Knoll, la chronique de Michel Zerbib

France.

Un fils endeuillé qui témoigne pour sa mère, la force et la dignité de Daniel Knoll, la chronique de Michel Zerbib
(Crédit: Twitter)

Dès la deuxième journée on a compris assez rapidement que les deux hommes mentent effrontément et que les avocats de la défense vont s’entredéchirer pour démontrer que le tueur est l’autre. On remarque aussi que l’un des axes de la défense de Yacine Mihoub (le voisin de Mireille Knoll) va être de battre en brèche la circonstance aggravante de l’antisémitisme dans le mobile du crime. Des avocats qui n’hésitent plus à dire que les juges d’instruction auraient cédé à la pression de l’opinion publique et aussi par la prise de position du chef de l’Etat qui n’avait pas hésité, quelques jours après le crime, à le décrire comme l’assassinat d’une vieille dame juive. C’était clair mais il faudra pourtant attendre 2020 pour que cette circonstance aggravante en raison de l’appartenance à la religion juive de la victime soit reconnue.

Il était si digne et fort. Mireille Knoll  donc "Chaleureuse" "pétillante", "bienveillante", les mêmes adjectifs élogieux ont tourné hier i aux assises de Paris pour décrire Mireille Knoll, "petit bout de femme douce" de 85 ans et de confession juive, pas pratiquante mais fière de son judaïsme et qui aimait tant la France et Israël , tuée à coups de couteau puis brûlée, le 23 mars 2018, dans son appartement parisien.

Une touche légère de gaieté, c’est si rare, à l'évocation de la manière si "attachante" qu'avait Mme Knoll "d'égayer la vie de son entourage" et de voir "la vie tout en rose"

Pourtant la vie de Mireille fut "une vie singulière traversée de drames" comme le dit le président de la cour.

Ses parents d'abord. Son père, tailleur, né en Ukraine et détenteur d'un passeport brésilien parce qu'il avait un temps vécu là-bas. Sa mère, femme au foyer venue de Pologne. Tous deux avaient fui les pogroms et trouvé refuge en France.

L'enfance est heureuse, raconte l'enquêtrice de personnalité à la barre . Jusqu'en 1941, quand le père, "pressentant un danger imminent" pour les juifs, part en zone libre avec le frère de Mireille. Une année de séparation douloureuse pour "la petite princesse de la famille".

En juillet 1942, Mireille parvient à s'enfuir de Paris avec sa mère, "le jour où elle apprend que la rafle du Vel D'Hiv a lieu" - Cette Rafle , rappelons d’ailleurs aujourd’hui , qui se fit avec la complicité active de l’Etat français et de sa police ( la France ce jour là commettait l’irréparable Chirac 1995) 

La famille, à nouveau réunie, vivra au Portugal, puis au Canada, avant un retour en France où les parents auront du mal à récupérer leur logement dans le Marais à Paris, squatté par le concierge.

Puis "la jolie petite brune coquette et joyeuse" rencontre Kurt, qui a grandi en Autriche et est rescapé d'Auschwitz. Une période en camp dont le père ne dira "rien à ses enfants", ce dont "on a énormément souffert", nous dit au procès Daniel Knoll, l'un de leurs fils. "On en parlait pas mais elle était partout la Shoah".

Mireille fut donc une "mère très aimante", selon l'enquête de personnalité. Elle fut aussi une femme coquette, dynamique, curieuse de tout, à l'image de son amie Renée Jean, au témoignage tout en couleurs. Comme Mireille , elle est une ancienne petite fille juive ashkénaze rescapée

ll  sera aussi question devant la cour de sa pratique  traditionnaliste et des fêtes juives. 

Ses revenus ? Mireille ne travailla que très peu de temps, comme garde-malade, et vivait depuis 1955 dans un logement social de 55 m2 dans l'est parisien.

Dans la résidence Mireille est connue pour avoir sa maison toujours ouverte , un havre de paix et de discussions libres, maison dans laquelle Yacin Mihoub fils d’une voisine avait ses habitudes.

Pour Daniel Knoll devant la cour, c’est l’occasion de dire "qu’on a tué un ange, elle n’avait fait que du bien … comment a -t- il pu concevoir un crime abominable lance t-il à l’endroit des accusés qu’il ne nommera jamais "ce sont des monstres, j’ai du mal à les regarder". Mireille Knoll qui avait toujours défendu le fils de la voisine , même lorsqu’il avait été condamné pour attouchement sexuel sur la petite fille de l’aide soignante de Mireille en février 2016 "ma mère était aussi bonne que naïve", dit encore Daniel. 

Alex Carrimbacus dit avoir été appelé par Yacine Mihoub pour un "plan thunes" pour le rejoindre chez la victime. Le second accuse le premier d'avoir demandé si Mme Knoll était "blindée".

Blindée ?

Mireille avait "800 euros de revenus, APL (aide personnalisée au logement) comprise", assure son fils Daniel.

Et d'ajouter, sans un regard pour l'accusé Yacine Mihoub, qu'il nomme "le monstre": "il la connaît depuis l'âge de huit ans", sa mère habitant dans le même immeuble que Mme Knoll. "Il sait très bien qu'il n'y a rien à voler chez maman. Je ne comprends pas".

Des vols ont pourtant été commis lors de cet après-midi du 28 mars au déroulé toujours flou, chacun des accusés se renvoyant la responsabilité de la mort de la frêle dame de 45 kg, malade de Parkinson, physiquement très diminuée.

Un élément a agité les débats jeudi : un couteau de cuisine à longue lame, découvert par hasard  par le frère de Yacine Mihoub chez lui, derrière la machine à laver. Leur mère, qui comparait libre assure que c'est le sien, les enfants de Mme Knoll  disent qu'il appartenait à la victime.

"Je l'ai amené chez mon frère" lorsqu'il était "en vacances", répond tranquillement  sans se démonter Yacine Mihoub. Quand le président lui demande pourquoi il l'a placé derrière la machine à laver, l'accusé répond, sans terminer sa phrase: "Vous savez, quand je suis alcoolisé, je fais des choses..." Des choses en effet dont on va continuer à parler...

https://youtu.be/q9no4o__koc

Michel Zerbib

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