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Le parallèle entre Israël et la France au sujet des coalitions politiciennes opportunistes, la chronique de Barbara Lefebvre

France.

Le parallèle entre Israël et la France au sujet des coalitions politiciennes opportunistes, la chronique de Barbara Lefebvre
(Crédit DR)

Ce vendredi matin à 7h10, l’enseignante et essayiste française, Barbara Lefebvre, était l’invitée du Morning d’Ilana Ferhadian sur Radio J. Elle est revenue sur les similitudes entre les situations politiques en Israël et en France.

Quand il s’agit de vitalité du débat public, la France et Israël ont incontestablement des points communs : un goût populaire évident pour la confrontation d’idées, un penchant pour l’interrogation critique et la mise en doute des discours, une passion pour l’objection argumentée. Le but n’est pas de trouver un compromis comme le font les anglo-saxons ou les scandinaves mais d’atteindre à la vérité, ou une part de vérité qui puisse enfin justifier qu’on se soit tant étriper pour des idées, conçues souvent comme universelles et dont nous pensons être les porte-drapeaux.

Toutefois, le doute peut au fil du temps laisser place à la défiance, voire la méfiance systématique à l’égard des dirigeants qui réclament nos votes pour gouverner en notre nom. L’esprit civique israélien est encore jeune, il n’a que 73 ans, la critique citoyenne à l’égard des politiques est forte mais la défiance n’est pas encore arrivée au point que nous connaissons en France. Le taux de participation électorale est un des indices de confiance des citoyens dans leurs élus : entre 30 et 35% d’abstention en Israël contre 60 à 70% en France ! il est toujours intéressant de rappeler qu’au présidentielles de 2017 seul 1/3 des 18-24 ans est allé voter, idem aux Européennes, moins encore aux régionales. En Israël les jeunes votent sans doute moins que leurs ainés mais ils votent considérablement plus que les jeunes Français, déjà désabusés et préférant d’autres modalités d’engagement civique.

On peut également s’interroger sur la qualité de l’offre politique et surtout la cohérence idéologique des partis en lice, la loyauté envers leurs électeurs. En Israël, on sait que le mode de scrutin impose des stratégies d’alliance pouvant conduire aux noces de la carpe et du lapin, le dernier gouvernement le démontre avec le parti islamiste Raam qui pourrait jouer le rôle d’arbitre des élégances, un comble ! En France, la déliquescence des partis politiques était amorcée avant 2017 mais elle fut actée par l’imprévisible succès de LaREM, ce parti centriste postmoderne néo-giscardien. Désormais la ligne idéologique de chacun des grands partis politiques français est si mouvante, si contradictoire que le citoyen finit par se désintéresser voire mépriser ces partis-girouettes. Seul les partis avec un chef, un leader parviennent à gommer leur versatilité politique. Qu’il s’agisse de laREM, du RN ou de LFI, le chef reste l’arbre qui cache la forêt. Aujourd’hui ni le PS ni LR n’ont de leader, pas davantage pour les écologistes qui n’ont pas la culture du chef et ne seront donc sans doute jamais en position de gouverner tant que nous vivrons dans une monarchie républicaine.

Contrairement à ce que nombre d’analystes disent depuis quelques jours, la victoire probable de presque tous les présidents de région sortants dimanche prochain ne me semble pas signifier pas que la gauche et la droite, comme structures politiques, comme clans partisans, demeure le clivage qui organise la vie politique et institutionnelle française. Ceux qui tirent des résultats de ces élections locales des conclusions nationales risquent d’en être pour leurs frais dans huit mois.

Les partis de gouvernement traditionnels que sont le PS et LR ne sont pas en bonne santé contrairement à ce que le 1er tour des Régionales indique, et cela ne tient pas seulement aux 70% d’abstention qui offriraient des victoires peu légitimes car fondés sur des socles électoraux insignifiants. Cela tient aussi beaucoup aux alliances incongrues qui ont été faites pour gagner ou pour tenir à distance le RN qui, lui, engrange seul ses votes. Si certains comme Xavier Bertrand, Carole Delga ou Laurent Wauquiez n’ont pas besoin d’alliés pour gagner dimanche, on voit que la plupart des numéros 1 en auront besoin pour espérer la victoire quitte à embrasser aujourd’hui ceux qu’ils combattaient hier. Dès lors, quelle peut-être la crédibilité d’un Renaud Muselier, déjà allié à laREM mais qui en appelle maintenant aux socialistes, aux écologistes et même aux communistes pour battre Thierry Mariani ? Quelle est la crédibilité d’un Eric Ciotti promettant hier de ne pas voter pour Muselier et qui affirme maintenant qu’il va voter pour celui qu’il traitait de traître et voulait exclure de LR il y a 2 semaines ? Quelle lecture politique de l’état de santé de la gauche et de la droite peut-on faire en observant le soutien à Valérie Pecresse des socialistes Jean-Paul Huchon et Manuel Valls quand Ségolène Royal et Lionel Jospin appellent de leur côté à voter pour l’union pastèque Bayou-Pulvar-Autain, vert dehors rouge dedans. Autre signe de cette démobilisation civique : la grève des urnes de l’électorat fidèle du RN qui a pour habitude de se mobiliser. A-t-il pensé que les bons sondages valaient élections automatiques sans avoir besoin de se déplacer ? A-t-il jugé plus utile d’attendre 2022 considérant l’échelon régional comme insignifiant ? Comment enfin interpréter l’état de santé du parti présidentiel qui n’a recueilli que 11% des suffrages au total, avec 3% des inscrits ? On se rappellera que François Hollande au Régionales de 2015 déjà à la peine (il avait pensé repousser ces élections) avait, lui, rassemblé 23% des suffrages. Il avait choisi, comme Emmanuel Macron aujourd’hui, de décorréler sa situation personnelle du verdict piteux des urnes pour le PS. Un an et demi plus tard, il n’était pas en mesure de se représenter.

Barbara Lefebvre

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